Ozan Aksoyek – « Ne croyez pas ce que je dis, vérifiez. »
- bruneaujulien
- 22 août
- 15 min de lecture
Dernière mise à jour : 25 août
Témoignage choral
COLINE CHARLIER, JULIE DEPORTEMONT, BRIGITTE HOORNAERT, GUILLAUME LOUTE, MARIA-FRANCA TOTARO, ANNE VANCLEE
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Que reste-t-il d’un enseignement lorsque l’enseignant n’est plus ? Lorsque viennent à manquer sa présence et son sourire, sa parole et son silence ?
Ozan Aksoyek s’est éteint en décembre 2023. Pédagogue infatigable et passionné, il accompagnait depuis une vingtaine d’années les personnes dans un chemin de présence à soi et à l’autre en s’appuyant sur les outils de la pleine conscience, de l’intelligence émotionnelle et de la méthode Feldenkrais, mais aussi sur ceux du clown et de la danse. Curieux, inspiré et plein d’esprit, Ozan était une figure très appréciée en Belgique francophone et sa disparition a laissé une large communauté en deuil.
Nous proposons ici un hommage choral qui rassemble les voix de plusieurs de ses élèves et ami·es – Julie, Brigitte , Guillaume, Maria-Franca, Anne – et de sa compagne, Coline. Prenant au sérieux sa propre formule selon laquelle « un bon enseignant apprend à ses élèves à se passer de lui », ces témoignages consistent moins en un regard rétrospectif sur la personne d’Ozan lui-même qu’en un recueil de l’écho que son enseignement continue de faire entendre à travers le cœur de celles et ceux qui ont choisi de cheminer à ses côtés. Dans les pensées, les gestes, les relations, qu’est-ce qui, aujourd’hui, reste vivant de sa transmission ? Qu’est-ce qui se métabolise, prêt à poursuivre son œuvre de transformation intérieure et d’émancipation, prêt à nourrir l’élan de celles et ceux qui en avaient déjà été touchés, prêt à allumer de nouveaux foyers chez d’autres encore ?
Ce que je garde de la transmission d’Ozan, au-delà du contenu de ce qu’il transmettait, c’est avant tout une personne, une posture et un état d’être qui étaient tout à la fois inspirants et riches d’enseignement. Ses transmissions étaient vivantes car il s’y impliquait dans toute sa vérité. Il se mettait en pratique ; il était lui-même le terreau d’expérimentation de ce qu’il cherchait à partager. L’observateur et l’observé.
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Recevoir un soin Feldenkrais de sa part, c’était sentir ma nuque se détendre lorsqu’il posait sa main sur ma cheville, c’était sentir l’espace entre les côtes s’épanouir lorsqu’il manipulait mon crâne par micro-mouvements. Et c’était sentir mon corps tout à fait autre au moment de me remettre debout. Un autre poids, un autre squelette, une autre marche, une autre relation avec le sol… avec le monde.
Et c’est je crois, le cœur de ce qu’il a toujours cherché à transmettre : apprendre à déployer une présence consciente et incarnée dans le présent, pour que notre corps et nos perceptions, alors transformés, transforment à leur tour ce que nous sommes, qui nous sommes… notre Nature profonde.
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« Poids, tête, squelette… déposer. Regard, horizon. Espace. » Ozan parlait parfois ainsi pour guider une pratique. Des mots sans phrase apparente.
Des mots pour nous laisser l’espace à l’intérieur de les entendre à notre manière, sans qu’il y ait d’information sur ce que nous devrions ressentir, sur ce qu’il serait bon de percevoir de ces « poids, tête, squelette… ». Les mots arrivaient libres de toute teinte bienséante et je pouvais alors écouter leur écho rebondir et descendre le long de mon squelette. Cette façon si particulière de guider me permettait d’entendre ces mots autrement, depuis l’intérieur. Laisser mon corps trouver lui-même le sens que ces paroles prenaient pour lui. Et ainsi, j’apprenais à faire le chemin moi-même, depuis ma spécificité, mes sensations, mon histoire, ma symbolique. Ozan nous apprenait à creuser notre propre chemin, il nous apprenait à se passer de lui. « Ne croyez pas ce que je dis. Vérifiez. »
« Un bon enseignant apprend à ses élèves à se passer de lui. »
Un jour, après un soin que je lui ai donné, il me demande : « Où étais-tu ? Avec moi ? Avec toi ? » Je lui réponds que j’étais avec lui, avec ce que je percevais de lui, concentrée. « As-tu vu l’oiseau qui était juste là dehors ? Étais-tu avec lui ? Comment être là si tu n’es pas avec tout ce qui t’entoure… avec tout l’univers ? »
*
Un autre jour, sans que je le voie, Ozan est arrivé derrière moi et il a posé la main sur mon bras. J’ai mis du temps avant de me rendre compte de la présence de sa main. C’était d’une subtilité extraordinaire. C’était bien plus qu’une qualité de toucher squelette, muscles ou peau comme il avait coutume d’en parler dans ses ateliers. C’était presque imperceptible et pourtant bien là. Comme s’il touchait en même temps ma peau, mes muscles et mon squelette ; mais aussi l’espace entre mon bras et sa main ; et l’espace tout autour de nous.
Une qualité de toucher que je n’ai jamais senti à aucun autre moment de mon existence. Un mélange de douceur, de délicatesse et d’une intense présence.
COLINE
« J’ai appris que les gens oublieront ce que vous avez dit, les gens oublieront ce que vous avez fait, mais les gens se rappelleront pour toujours ce que vous leur avez fait ressentir. »
Maya Angelou
NOTES D’ATELIER (danse) – 1
(BRIGITTE)
EXERCICES
Proposition pour deux personnes.
L’une choisit un lieu où se poser et ferme les yeux.
L’autre la recouvre avec tout ce qu’elle trouve autour pendant dix minutes : des morceaux de bois, de la terre, des feuilles…
Puis la personne posée, recouverte, prendra dix minutes pour se relever.
La deuxième personne observe.
* * *
Marcher.
Marcher en arrière.
Marcher en avant de la même manière qu’en arrière.
Marcher à quatre pattes à votre façon.
Marcher à nouveau en avant comme si vous étiez à quatre pattes, sans mimer.
Marcher dans un brouillard. Puis le brouillard se dissipe et vous découvrez la mer et l’horizon.
Vous êtes le brouillard puis redevenez l’homme dans ce brouillard.
Marcher le long de l’eau.
Marcher dans la chaleur jusqu’au point culminant.
« L’invitation serait de… revenir à la maison »
Par où commencer ?
Ton enseignement me manque cher Ozan. Comme tu peux le voir, je me suis fait tatouer un méditant avec une de tes célèbres invitation : « L’invitation serait de… Revenir à la maison »… Humble hommage mais surtout petit rappel permanent de cet enseignement précieux…

Il arrive fréquemment que je pense « Tiens, je demanderais bien conseil à Ozan »… d’autant plus que je me suis lancée depuis cette année dans le cours universitaire sur la Pleine conscience à l’ULB comme tu me l’avais conseillé. Oui, tu m’as donné l’envie d’enseigner moi aussi cette pratique qui a contribué à ma renaissance.
Le tout premier module que j’ai suivi avec toi, je ne peux l’oublier, il s’agissait du cycle MBSR, une découverte pour moi et, je n’ai pas peur de le dire, le début d’une nouvelle vie.
J’ai assez vite accroché à la Pleine conscience, avec des hauts et des bas car ce n’est pas évident au début, mais ta personnalité donnait envie de s’accrocher. La cerise sur le gâteau était la petite histoire du Sage Nasreddin à la fin de chaque séance, personne ne la racontait aussi bien que toi.
Après le cycle MBSR je suis tombée gravement malade. J’avais alors entamé l’approfondissement avec toi. Là encore, tu étais toujours présent, par mail la plupart du temps, répondant à toutes mes questions avec bienveillance, par des questions, comme tu savais si bien le faire ; )
Cet enseignement a été une bouée incroyable pour moi en ces moments difficiles et principalement « un jour à la fois », « le moment présent »…
J’ai aussi suivi un week-end Transformer les émotions auquel tu m’as généreusement invitée lorsque tu savais que c’était compliqué. Tout en discrétion, sur la pointe des pieds, cette bienveillance te caractérisait vraiment bien.
J’ai tellement appris grâce à toi que j’ai cassé les oreilles de mes proches, les poussant à suivre à leur tour le cycle MBSR avec toi. J’y suis parvenue : ma fille, mon frère et ma meilleure amie l’ont suivi, tous enchantés et touchés à ton contact. Ils ont tous eu beaucoup de peine lors de ton « départ » même s’ils t’avaient peu connu. Ils s’étaient eux aussi attachés et te voyaient comme quelqu’un à qui rien ne pouvait arriver…
Et, pour finir, malheureusement ta dernière retraite, ma retraite en silence, indispensable pour pouvoir m’inscrire à l’ULB, un grand moment. Sans me douter une seconde que ce serait mon dernier enseignement avec toi.
Après cela, je t’ai seulement revu à l’hôpital, un choc contenu lorsque je t’ai vu si amaigri…
Mais là aussi tu m’as enseigné… je savais combien tu avais souffert lors de ce dernier séjour en montagne et tu m’as dit, en regardant fièrement la photo de Coline, Nadire et toi : « Là ça commençait à devenir vraiment inconfortable »… Là où moi j’aurais plutôt utilisé des mots comme « insupportable », « très douloureux ».
Ce jour-là aussi, j’ai appris et je t’en remercie.
Alors voilà, ma façon de suivre tes pas est la formation de l’ULB que tu m’avais conseillée. J’ai hâte de pouvoir transmettre comme tu le faisais si bien, en toute humilité car je ne t’arriverai pas à la cheville, mais tu seras présent. Ah oui bienveillance envers moi, ça aussi tu me l’as appris, donc pas de comparaison.
Je suis sûre que tu gardes un œil sur moi de là-haut et je t’entends dire « Comme c’est intéressant », « Ne croyez pas ce que je dis » …
À la Maison du Chemin des Roches, l’arrivée au premier module a été particulière, je te voyais partout et l’émotion était forte, je l’ai accueillie. Dans la salle de méditation j’ai trouvé le moyen de l’apprivoiser, je me suis mise à la place que tu occupais lors de la dernière retraite, je me suis alors sentie apaisée, sereine et connectée à toi.
Merci Ozan.
MARIA-FRANCA
NOTES D’ATELIER (danse) – 2
EXERCICES
Conversation - les omoplates :
Considérer chaque omoplate comme un corps indépendant. Les bouger en conversation l’une avec l’autre.
(bouger l’omoplate elle-même, sans l’épaule, ni le bras.)
À deux. Une personne bouge, l’autre observe la subtilité des mouvements : les détails, les liens, les respirations…
Conversation entre le plexus solaire et le menton :
Travailler avec un partenaire.
L’un écoute la matière de l’autre.
Utiliser d’abord la présence de l’autre pour ensuite revenir à soi.
Être écoutée par l’autre m’aide à entendre ce qu’il y a.
Comment puis-je m’accueillir moi même ?
« Les gens cherchent souvent ce qu’il y a au-delà d’eux. Moi, je cherche ce qu’il y a en-deçà. »
Lettre à Ozan du 10/12/2023
(réécrite le 28/03/2025)
Ozan,
Mon ami, mon amour, mon maître, « mon » Ozan…
L’homme de toutes, de tous, de chacun et de chacune. Tu es là pour tout le monde, pour le monde, pour mon monde à moi dont tu fais partie…
Je t’aime parce que tu m’as sauvé la vie, deux fois, et TOUT en toi transpire la vie, l’émerveillement, l’amour et nos/mes forces et faiblesses que nous avons partagées…
Tu me manques, tous les jours… Pour la vie… Mes trois garçons, Victor, Basile et Jules sont marqués à vie par leur rencontre avec Coline et toi, ton histoire, votre histoire. Nous t’évoquons, souvent.
Pourquoi ? Pourquoi toi ? Pourquoi maintenant ?
Des tes nombreux et heureux enseignements, il faut retenir l’ACCEPTANCE car il n’y a que ça. Tu dis souvent : « ÇA est là », étendre les sensations, les laisser s’exprimer. Être vues, entendues, accueillies. Reconnaître les particules qui la/le/les composent…
Accepter ce qui es, n’est pas un renoncement mais permet d’agir au mieux. D’avoir une action réfléchie au lieu d’une réaction émotionnelle. Faire de la place à ÇA permet que ÇA ne prenne pas toute la place.
Par ailleurs, il s’est passé une chose incroyable dans mon carnet de nos retraites, lors de ton départ. Un cercle s’est formé dans mes notes, qui les rendent curieuses et difficiles à relire, le texte n’apparaissant qu’en filigrane, à la lueur d’un rayon de soleil ou d’une bougie…

Enfin, je remets ici un texte que tu as lu lors d’une magnifique retraite (La Paix du monde sauvage de Wendell Berry) :
Quand le désespoir pour moi et pour le monde grandit en moi et que je me réveille dans la nuit au moindre bruit, de peur de ce que ma vie et celle de mes enfants pourraient être, je vais m'allonger là où le canard sauvage se repose dans sa beauté sur l'eau, et le héron cendré se nourrit.
Je me pose dans la paix des êtres et choses sauvages qui ne font pas peser sur leur vie la possibilité d’une douleur.
J'entre en présence d'eau calme.
Et je sens au-dessus de moi les étoiles aveuglées par le jour qui attendent de briller avec leur propre lumière. Et, pendant un temps, je me repose dans la grâce du monde et je suis libre.
GUILLAUME, pour toujours !
NOTES D’ATELIER (danse) – 3
RÉCIT D’EXPÉRIENCE, avril 2011
J’attends, de dos. Pascale entre avant moi. Un ennui s’installe.
J’attends. La cloche résonne et j’apparais au lieu, aux gens, j’apparais sans présence. Je reviens au visage pour essayer de revenir en moi-même.
Je n’affronte pas encore le regard du public. Virginie pleure, son émotion monte dans mes yeux. Quoi faire de ça ? Je palpe l’espace. Je préfère la droite pour ne pas être face à elle. Le regard vers le public déclenche mes larmes. Plus loin mes mains lourdes vers le sol, je ferme les yeux et les ré-ouvre pleins d’eau. >>> pleins d’eau ? Pourquoi cette tristesse ? Mon nez coule, déborde, ??? traversée d’une piscine de lumière sur le coin du mur. Je cherche à y entrer. Prendre ce coin comme un appui jusqu’à me casser la gueule, en pleurs, tant d’eau coule, je passe ma main sous mon visage pour attraper le fil débordant. Je ris avec les regards du public et je pleure de dépit. Il y a sur le sol les chemins que mes larmes ont dessinés, comme les gouttes de sang d’une blessure. Rire et en pleurer et re-parcourir le chemin déjà parcouru.
Ozan dépose un mouchoir devant moi. Je le regarde, m’en approche et reste au dessus.
Déverser mes eaux. Éponger. Je continue mon parcours… Suivre mes larmes.
Ozan me propose d’ouvrir la fenêtre. Il y a eu beaucoup de pas à reculons, une main lente posée sur la poignée, le bruit du caoutchouc qui s’écarte lentement, puis s’ouvre... Je respire le vent.
« Qu’est ce que tu vois ? » me demande-t-il. Les crasses de la vitre.
« Une dernière action ? » Je vide mes poches.
* * *
C’est difficile de résumer dix ans de tango, d'enseignement et d'amitié dans une lettre.
Bon, j’essaie. J’ai connu Ozan au tango. Il m’a invitée à danser un soir. Il avait une chemise blanche et des pantalons amples avec des bretelles qui sentait le cheval… Toutes les semaines nous dansions plusieurs soirées ensemble, environ trois tandas par soirée…
Et un jour, je lui ai dit : « Tu es un body-worker. » Alors, il m’a expliqué qu’il faisait du Feldenkrais. Il ne faisait jamais de publicité pour ce qu‘il faisait.
Un samedi soir, Maison du Peuple, on dansait, il ne pouvait pas me parler, il n’avait plus de voix… « Qu’est-ce que tu as fait ? » je lui demande… « Parler pour cinq mille personnes…» Quoi ? Et puis il m’a expliqué ce qu’il faisait chez Émergences.
J’ai commencé à suivre les séances de Feldenkrais du samedi, et puis des séances individuelles. Plus tard, il m’a conseillé de faire de la pleine conscience, ce que j’ai fait quatre fois. Petit à petit, le cours avancé et puis les retraites… et les promenades en forêt de Soignes – sa vrai maison.
J’ai suivi deux fois des stages Body Weather. Comme lui, j’ai passé quelques mois au Japon, mais aussi en Inde …
Pour moi Ozan est toujours là. De la méditation du matin aux exercices de taï chi et jusqu’au tango, le soir.
Ses paroles que je préfère :
« Well done, tranquille, ralentir, se retirer, il faut dépasser le guru… » C’est pour cela qu’il est mort… « AH BON» – ça, c’est ma favorite… «La vie c’est souffrir et mourir, mais il y a des petites étoiles et des cadeaux.»
Et personne ne pouvait raconter les histoires de Nasreddin aussi bien qu’Ozan.
Voilà un tout petit peu Ozan sur le papier ou… l’écran…
Merci pour le travail que vous faites,
Amitiés,
ANNE VANCLEE
« Si vous ne savez pas ce que vous faites, vous ne pouvez pas faire ce que vous voulez. »
Moshe Feldenkrais
« Tout est en tout »
Voici quelques souvenirs :
Arriver aux ateliers Feldenkrais ou aux retraites sans en connaître le thème et avoir confiance d’aborder exactement ce qui doit l’être car « tout est en tout ».
Le 13 novembre 2020, arriver à la première séance de suivi individuel avec l’intention de travailler la mobilité du corps et réaliser en début de séance, par le biais d’un dessin qui représente « ma demande » que je dessine un cœur avec des ailes, sans savoir pourquoi.
Lors de cette première séance, n’avoir que très peu d’échanges verbaux mais plutôt des échanges par les corps et se retrouver à pleurer, avoir des séries d’images du passé qui refont surface, qui éclairent un ressenti du moment et terminer la séance en sentant un « espace ouvert », un espace d’accueil.
Continuer à pleurer pendant des heures le jour même.
Prendre contact, toujours ce même jour, avec une personne qui refuse la communication depuis plusieurs mois et qui ce jour-là accepte de discuter.
Toutes les trois semaines pendant plusieurs années, continuer durant plusieurs séances d’aborder ce qui surgit au moment de la séance, puisque tout est en tout. Parfois la séance débute par une question, parfois par un silence, parfois par une proposition (une photo à emmener…).
Sortir des séances parfois en ne ressentant rien de particulier mais en observant des changements quelques jours plus tard dans le quotidien – « Il n’y a rien à faire » –, parfois en sentant un changement pendant la séance, une impression de clarté, de paix, de soulagement, de retrouver de l’énergie.
Laisser le tout infuser petit à petit dans le quotidien, et en modifier la couleur, la texture, l’odeur, le goût. Observer les changements, à l’intérieur et à l’extérieur.
Des séances individuelles. Prendre soin d’observer ce qui surgit là maintenant, et lui faire de la place. Laisser le corps être traversé, s’exprimer. Comprendre un peu plus ce que signifie suivre sa respiration. S’ancrer, s’aligner. Dériver. Revenir. Choisir.
Des stages et retraites. Le souffle et le corps comme repères, guides, alliés. Les routines de Qi Gong du matin et du soir. Laisser décanter, y voir plus clair. Continuer l’exploration.
Au cours des séances, ne jamais sembler aborder directement le thème initial de la mobilité du corps, mais réaliser dans le quotidien (notamment lors de pratiques équestres) que le corps que je vivais comme une prison (« cage » thoracique), devient un moyen de communiquer, d’entrer en contact, de s’écouter, d’écouter l’autre, de transmettre.
Réaliser un jour que le corps se met à bouger sur de la musique et danser de façon spontanée en n’ayant pas de souvenir d’avoir expérimenté ça auparavant, à presque quarante ans.
Avoir une envie soudaine de prendre un bain, et en prendre un.
Quatre ans plus tard être capable de faire un trajet de huit heures de train sans lire, sans écouter de podcast, sans discuter avec personne, juste être assise là.
Expérimenter la détente, le ralentir.
JULIE
« Faire moins c’est parfois sentir plus. »
NOTES D’ATELIER (danse) – 4
EXERCICES
Le fait de se sentir respirer nous fait revenir au présent
Le fait de préciser le visage précise l’ensemble.
Clarifier le visage clarifie tout le corps.
Le visage et les mains prennent 50 % de l‘espace.
Nous sommes à deux, face à face, chacun assis sur une chaise.
L’un entre dans sa danse par le visage.
Y aller à 300 % puis revenir.
Fermer les yeux.
Sentir à nouveau, ré-ouvrir les yeux.
Un regard large.
L’autre accueille.
Un oui inconditionnel.
Laisser le visage transparaître dans tout le corps.
Quitter la chaise
* * *
Garder la chaleur, l’énergie, et la transformer en concentration
S’arrêter au sol dans une position pas trop confortable. Imaginez que le sol est gelé et qu’il neige. Vous gardez la chaleur de votre corps pour vous, vous la gardez dans chaque partie du corps, chaque extrémité, par une tension minimum et des légers mouvements.
« Si vous pensez que rester en apnée est une bonne option, surtout ne respirez pas. »
Se mettre en mouvement uniquement sur l’inspiration. Pause – petite apnée. Puis expiration. Pause – petite apnée. Se mettre en mouvement sur l’inspiration (Idem à deux, avec l’un qui observe l’autre, puis inverser).
* * *
Nous sommes en ligne face au mur.
Ozan nous propose de dire à haute voix tout ce qui nous passe par la tête de ce qu’on voit. Il nous propose de nous rapprocher à vingt centimètres du mur et de dire ce qu’on voit.
Il y a quelque chose du délire, de fou, d’explosant, de prenant, de joyeux. Je découvre un nouvel aspect de moi-même il y a quelque-chose de l’extase.
Quitter la sérénité de l'asphalte
Traîner les pieds dans la bruyère
S'endormir debout contre un arbre
Laisser les racines creuser le sol
Caresse du vent entre les deux oreilles.
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Les exergues sont des citations directes d'Ozan ou des citations qu'il affectionnait. Le poème final, retrouvé dans ses notes, est probablement de lui également.
Traversée d'un souffle remercie chaleureusement chacun et chacune des contributeur·ices, et en particulier Coline Charlier qui a accordé sa confiance et donné de son temps pour permettre cette publication. Pour moi aussi, éditeur de ce site, Ozan était un ami, depuis plus de vingt ans, et je joins ma voix à celles exprimées ci-dessus pour lui dire mon amitié, mon respect et ma reconnaissance.
BIOGRAPHIES
Ozan Aksoyek : voir page « auteur·ices ».
Coline Charlier – Coline, compagne d'Ozan, maman, comédienne. Animée par la recherche d'une présence toujours plus ancrée, là, vivante.
Julie Deportemont (43 ans) – Depuis que je suis jeune, les chevaux me guident sur un chemin de rencontre et de découverte. Déjà formée en biochimie, criminologie et horsemanship, je me forme actuellement à l'Équitation Centrée. Depuis 2012 j'enseigne le horsemanship et développe un lieu qui accueille les personnes désirant apprendre ou partager leur expérience dans le domaine équestre, ou autre.
Brigitte Hoornaert – S’attachant aux paysages, à la mémoire de lieux, de gestes ou d’images, sa pratique se situe au croisement de la photographie et de la danse improvisée. Artiste, chercheuse et pédagogue.
Guillaume Loute – 50 ans, heureux père de trois garçons (aussi) touchés par Ozan… Beaucoup d’ aspirations accomplies, donc c'est « OK ». Géographe et pédagogue, formateur, consultant multidisciplinaire et sauvé deux fois par Ozan, mais aussi (parfois) : « re » alcoolique, méditant, tantrika… Et surtout, (toujours) pratiquant explicite de l’honnêteté de la relation et du bien faire et laisser dire. Monsieur « oui », « c’est possible ». Et, une voix basse, aux fréquences propices…
Maria-Franca Totaro – 51 ans, passionnée de pleine conscience depuis ma rencontre avec Ozan et sa manière captivante d’enseigner. En pleine reconversion : en route vers le diplôme d’instructrice MBSR afin de transmettre à mon tour cette pratique qui a tout changé.
Anne Vanclee – Professeure de Pilates depuis plus de quarante ans, danseuse de tango depuis plus de vingt-cinq, mère de cinq enfants et grand-mère de cinq petits-enfants… et toujours à la recherche et en exploration du « ALL THAT IS » !
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